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Les merveilles, roman

Claire Castillon

Grasset

  • Conseillé par
    6 janvier 2012

    Avertissement : âmes sensibles s'abstenir !

    Un premier mai qui tourne à un massacre. Evelyne, enfant, assiste à une scène d’une cruauté insoutenable. Impuissante, elle voit son père accrocher son chien adoré Lulu à l’arrière de la voiture et le traîner sur plusieurs centaines de mètres. Depuis ce jour, les cloches résonnent dans sa tête. Pour Luiggi son compagnon, elle fait des ménages dans une usine. Elle mène une double vie car il n'y a pas d'usine. Elle est escort-girl ou tout simplement pute.

    A son habitude, Claire Castillon nous fait renter très vite dans le vif sujet. Troisième page et l’horreur insoutenable. Le père, représentant mal dégrossi, pète un plomb et Lulu trinque, plus qu’amoché. Je me suis retrouvée yeux écarquillés, la bouche formant un rond et d’où sortait un « oh » puis le souffle coup. La vie de la famille d’Evelyne est piquée, surpiquée. Jeux de mots chocs, petites phrases cinglantes et ça bouscule, ça télescope.
    Et les cloches tintent, elle se livre à la brutalité. Evelyne s’enferme dans un autre monde tout aussi désenchanté que le réel. A treize ans, elle découvre le sexe puis croit trouver l’amour en Luiggi, pizzaïolo simple et gentil. Mais les cloches résonnent toujours par moments. Evelyne n'en peut plus de ce quotidien où chaque sous est compté et où la pauvreté la ramène à celle de son enfance. Avec en plus un enfant à élever. Comme pour rendre moins moches leurs vies, elle fait commerce de son corps, elle « pute » comme elle le dit. Activité où elle excelle. Un jour, elle rencontre Claude un client qui la fascine par son intelligence. La honte de n’être pas cultivée et l’envie de vouloir s’élever l’oppressent. Les cloches seront les plus fortes, pulsions violentes d’un désespoir sans appel.
    Entre tendresse et une innocence candide, un quotidien glauque dont elle aimerait sortir, une enfance volée, on assiste au désarroi et aux angoisses d’Evelyne. Prisonnière de son mal être comme dans une bulle qui finit par éclater. Forcément.

    Une lecture qui m’a chavirée et laissée en bouche un goût amer. Le regard d’Evelyne sur ce qui l’entoure est dérangeant mais vrai. C’est peut-être cette lucidité qui fait le plus mal au final. Si ce n’est pas un coup de cœur contrairement à certains de ses précédents romans, il s'agit d'une lecture comme un tour de manège dont on sort avec un léger malaise et la tête qui tourne mais l’envie de recommencer. Un peu plus tard.