Des machines pour les autres

« Les nattes et les coussins sont dehors, les étoiles sortent peu à peu.
Couchés, on attend : le mécanicien, le forgeron wolof, le chauffeur et le
traducteur, on s'endort peu à peu. Du lait dans une grande calebasse, que l'on
se passe sans trop bouger. Des gens viennent s'allonger près de nous, on est
dans les étoiles, le vent nous frôle parfois. Qu'est-ce qu'on veut savoir au
fait ? Le mouton grillé est là, on se rapproche : on verra demain. Ailleurs au
Népal, tout le long du chemin rocailleux à travers des morceaux de rizières et
des bouts de montagne cassée, tout au long de la route qui va de Katmandou à
Mahancal… Les nouvelles turbines métalliques, ça doit sûrement être mieux, les
ingénieurs le disent. Ça va plus vite, c'est vrai, mais le riz ne pousse pas
plus vite et, même si la production augmentait, ça profiterait à qui ? On rit,
on se croise, ça continue, un thé chaud, et toujours ces questions dans la
tête et le plaisir d'être là. Et si c'était ça les technologies appropriées ?
Cet échange, ce plaisir, cette volonté commune que ça aille mieux. Et le temps
de prendre son temps ensemble. Être bien, aujourd'hui pour demain : la
solidarité. Ce dossier aborde, à partir de nombreux témoignages de « gens
bureau exécutifs du Sud » et de « gens du Nord », les questions fondamentales
du mouvement des technologies appropriées, lancé - il y a vingt ans - dans la
foulée du célèbre "small is beautiful" de E. F. Schumacher. \- comment
concevoir, tester et diffuser des technologies pour les plus démunis ? \-
pourquoi faire « des machines pour les autres » ? En présentant l'état des
discussions sur ce thème, cette approche ouvre le débat sur des aspects
originaux - et peu souvent traités - de la solidarité Nord/Sud et des projets
techniques de développement.